Un communiqué de la Defense Security Coopération Agency (DSCA) américaine annonçait, le 21 décembre, que le département d’Etat américain avait approuvé la demande de l’Etat français. Celui-ci souhaite acquérir une catapulte électromagnétique de lancement d’aéronefs (EMALS), afin d’équiper son futur Porte-Avion Nucléaire de Nouvelle Génération (PANG). Cependant l’achat n’est pas encore totalement confirmé.
L’annonce intervient quelques jours après la signature d’un « cadre d’interopérabilité stratégique » entre la Marine Nationale et l’US Navy. Les événements ne sont pas explicitement liés. Cependant, le communiqué de la DSCA précise bien que le programme est destiné à poursuivre l’ « interopérabilité entre la France et les Etats-Unis » (en anglais dans le texte), et qu’il : « soutiendra la politique étrangère et la sécurité nationale des États-Unis en aidant à la sécurité d’un allié de l’OTAN ».
Decryption a contacté la Direction Générale de l’Armement (DGA) pour plus de détails. Celle-ci a rappelé que l’achat n’est pas encore définitivement acté. Il doit encore être validé par le Congrès américain. Le processus semble toutefois en bonne voie, compte-tenu de la certification délivrée par la DSCA.
Achat sur étagère
Deux catapultes EMALS ont été commandées, au lieu des trois prévues à l’origine, ainsi qu’un dispositif d’arrêt avancé. Elles seront fournies par General Atomics, qui équipe également les porte-avions de la classe « Gerald Ford ». A noter que le contrat prévoit aussi l’installation des catapultes, la formation des opérateurs, des pièces de rechange, une assistance technique, etc.
Le montant total de la vente sera de 1, 321 milliards de dollars. A noter qu’il s’agit du coût maximum. Il est susceptible de baisser en fonction de l’évolution des besoins ou bien de la nature des accords.
En cas de feu vert du Congrès, les EMALS équiperont donc le futur PANG. Celui-ci sera un porte-avions lourd, en jaugeant 75 000 tonnes, contre 42 000 pour le CDG, et pour une longueur de 300m. Il sera en capacité d’emporter près de 2000 marins et une trentaine d’aéronefs.
Vapeur ou Électromagnétisme ?
Certaines critiques s’étaient élevées contre l’emploi d’une technologie, les EMALS, jugée peu mature et insuffisamment fiables
Certaines critiques s’étaient élevées contre l’emploi d’une technologie, les EMALS, jugée peu mature et insuffisamment fiables. L’agence Bloomberg avait d’ailleurs fait la recension, en janvier 2021, d’un rapport du Pentagone allant dans ce sens. Ces défauts semblent, manifestement, avoir été depuis corrigés ou relativisés.
Même si certains reprochent aux EMALS des défauts de jeunesse, ces dernières disposent d’atouts importants. Elles permettent notamment une cadence plus rapide de lancement [d’aéronefs]. Par ailleurs, leur propriétés permettent une intensité progressive des lancements : beaucoup moins traumatisante pour les vecteurs. Ce qui permet d’envisager le lancement de drones à voilure fixe. Une condition qui semble incontournable pour le lancement des futurs remote carriers (essaim de drones) qui accompagneront le chasseur (New Generation Fighter– NGF) du SCAF.
Le choix des EMALS, grosses consommatrices d’électricité, a aussi contribué au choix d’une chaufferie nucléaire, en l’occurrence les futures K22. La taille du PANG, et des impératifs opérationnels (endurance, disponibilité, etc) ont également largement pesé.
Pour de nombreux officiers, la question de l’achat sur étagère des EMALS n’est pas un problème en soit. Et les catapultes vapeur du Charles de Gaulle avait été en effet acquises auprès des États-Unis. Selon des sources de la Marine Nationale, la production de catapultes EM nationales serait une entreprise particulièrement chère, pour un équipement qui n’est pas considéré comme stratégique. Et dont les perspectives d’exports sont très limitées. Cependant, ceci place Paris dans une situation de dépendance à Washington. Pour un équipement qui, sans être stratégique, reste critique. Comme sur d’autres capacités (E3-Awacs, MQ-9 Reapers, etc), la France ne devrait pas faire l’économie d’une réflexion sur le long terme.